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Delphine Léger-strauss : L'église Saint-Gervais
   Vous voyant réagir à ma belle Vierge du chemin je rentre en votre honneur pour la première fois depuis au moins cinq ou six ans dans l’église Saint-Gervais derrière la place de l’hôtel de Ville à Paris. En la longeant, on descend par degrés jusqu’à la Seine et l’Ile Saint-Louis... Traditionnellement, dans le Paris médiéval et alchimique, ma rive droite est celle des banquiers et du pouvoir. Et la rive gauche, celle du savoir et de l’Université. Au milieu, l’île représente le ciel. Le lieu spirituel avec la Sainte Chapelle entre les deux bras de Seine. Bref, j’entre et je retourne m’asseoir dans l’oratoire de la Vierge derrière le maître autel. C’est un lieu consacré à l’oraison où j’ai passé de nombreuses heures autrefois... Avant la maladie et la mort de ma mère, où tout attrait pour ces faits et lieux me fut retiré... J’ai d’ailleurs écrit une ou deux nouvelles sur ce sujet de la prière... Il y a là un monsieur sur la droite en short et chemise à carreaux bien estival. Calme. Je m’assieds sur la Gauche près de la grille de séparation avec le couloir de circulation. Et je pose mes mains comme la Vierge de la rue sainte croix : ouvertes. Un petit temps plus loin, un monsieur entre, costume bleu marine, barbe et chemise à fleur mais sentant le renfermé, voir la semi cloche. Il se place à ma gauche. Deux chaises plus loin. Je sens son odeur de draps oubliés trop longtemps dans un lit et peut être même un peu plus... Mon père souvent seul pouvait parfois avoir de ces draps là. La Vierge compatissante me fait face. Le monsieur se lève immédiatement et part. Je le reconnais je suis un peu soulagée. Sa présence était un peu inquiète. Il revient aussitôt avec un cierge géant et me le pose sur les genoux. Pour toi ! Je vais prier pour toi... Je grommelle. Il me redit que c’est fait. La Vierge s’amuse. Il me cale le cierge dans la main droite et pose sa main sur la mienne. Je vois qu’il a besoin de proximité... Je ne vois pas encore pourquoi brusquer les choses. Il fait le signe de croix. De ma longue expérience, je connais ces besoins d’extériorisation et de prière à la russe...du genre le pèlerin, mais voici que l’homme me prévient.Une première fois : je rapproche ma chaise. Puis une seconde fois : je vais mettre ma chaise contre la votre... Je lui laisse un instant ma main au bénéfice du doute, mais je le préviens que je vais partir...Si non il finira sur les genoux et je ne suis pas la Vierge et il n’est pas le Christ ... encore que... (Une dame à cheveux gris et masque de protection entre et s’assied à droite, presque devant l’autel où brille la lumière rouge de la Présence réelle. Il me supplie de rester et la regarde comme la peste... Est-il interdit de chapelle et suis-je sa caution ? Je m’empare du cierge géant, de mes deux paquets et de mon chapeau de paille, et fuit littéralement ! J’enfourche le grand cierge sur les piquets de métal noir... et dévale les marches puis les degrés vers la Seine. Comme je l’ai vu esquisser un mouvement de se lever... je le confie à la vierge et traverse la Seine. Il ne me suit pas dans l’ile au ciel.
 
Delphine Léger-strauss : L'église Saint-Gervais
Tag(s) : #Récit
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