Plus j'avance mes pas dans la vie, plus la vie dépouille. Les âges de la vie n'ont rien de triste, ce sont les marches d'un escalier, la seule tristesse étant de s'attacher aux marches à franchir plutôt que d'espérer en ce qui attend le grimpeur. Bien sûr que parfois la montée essouffle, mais quand on comprend que s'alléger, c'est se laisser débarrasser de poids - on ne monte pas au sommet encombré - peu à peu l'intelligence du cœur s'ouvre à l'essentiel à mesure qu'elle approche le ciel. Mon aspiration se fait tout autre... Du haut des marches, la vision englobe tout l'horizon, les sables mouvants en bas tandis que le ciel se devine toujours plus. Oui, mais après ? me diront certains. C'est un jardin secret, comme celui des moines, oasis de verdure parmi les pierres où seuls les embruns nous rapportent le parfum des roses.
(Mont Saint-Michel, 22/10/2015)
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Ni convoitise ni avidité !
Il est ce qui fait sortir de soi.
Il est le mot jaillissant
La note qui résonne
l'idée lumineuse
élan
Il est feu qui ne consume pas
Il est braise
Il est flamme
IL EST
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Il faut beaucoup d'humilité pour être un héros véritable,
mais il faut encore plus d'héroïsme pour être véritablement humble.
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Ne dis rien, fais en te respectant
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Au matin, j'arrachai la vigne-vierge comme autant de filandres d'étoiles que j'attirai à moi
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Sans ce souffle de vie en moi, en toi, en tout, il n'est rien.
Œuvre d'humilité
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Enfoncer la porte, ouvrir une brèche, tenter de réveiller de l'oubli,
espérer, désespérer, le chaud suivi aussitôt du froid,
la légèreté plombée et recommencer encore,
saisir la faille, entrer, rentrer...
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Serais-je une larme
que je m'infiltrerais dans chaque sillon de ton visage
rejoindre ces lèvres muettes
et qu'y fonde le sel de la vie...
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Les blessures traversées sont les empreintes de nos avancées.
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Ce qui est lisse est plat.
Ce sont les houles qui apprennent la navigation en haute mer.
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Vouloir capter la lumière, c'est lui faire de l'ombre.
Il faut craquer l'allumette intérieure.
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Ne pas rompre trop vite le mystère du silence. Bâtir le pont.
Assise près de la fenêtre, le soleil dans le dos.
Page éclairée. L'air révélé dans une danse des ombres sur le noir des mots, sur le blanc du papier.
La vie invisible, là........ Chatoiement dans ce souffle entre-aperçu.
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Un jour l'éternité s'est faite étreinte et nous en fûmes saisis.
Depuis nous cherchons à saisir l'amour.
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Et la chanson ivre
résonne des brumes d'hiver
Ils reviendront les dieux
que nous pleurons
Ils renaîtront les amants que nous étions
La terre a frémi au souffle prophétique
De la grotte fatale
aux pèlerins imprudents
les portes se fermeront
Et sur les eaux létales
la barque à jamais
fendra l'horizon
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Il est un rêve en nous enfoui,
il dit l'Inconnu,
l'Oublié,
l'Amour fou
pour un temps
effacé
au corps rompu
de l'âme en exil.
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Lignes de vie
Des lignes de la main
aux lignes de ma vie,
une ligne de démarcation...
Les mots passent
Frôlent
Caressent parfois
Jamais ne se fixent
Se taisent
Pudeur?
Erreur ?
Ou omission ?
Dis-moi mon âme ?
De ce voyage
Nue
Jusqu’aux nuées
Es-tu jamais revenue
Es-tu jamais née ?
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Écriture toujours, comme une promesse encore enclose, comme un flottement, curieux mélange de vérité et d'aspirations, d'ombre et de lumière, de doutes en certitudes, d'échancrures en écorchures, de lignes courbes ou droites, de prose et de vers, de pauses et de revers, égratignures de la page blanche...
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Ces extraits du recueil d'Isabelle Debiève, "Comme une présence", ont été librement choisis et mis en page pour L'Ardent Pays, parmi beaucoup d'autres textes, par André Campos Rodriguez..